Nombreux sont les enseignants et professionnels qui souhaitent offrir aux élèves des capsules vidéo pédagogiques. La première considération du pédagogue devrait porter sur la charge cognitive des vidéos produites. Je vous invite à lire l’article Planifier, réaliser et diffuser des vidéos éducatives: lignes directrices et astuces pour les enseignants publié sur Profweb qui aborde plusieurs éléments essentiels concernant la qualité pédagogique des vidéos.
Par exemple, utiliser du texte et des symboles à l’écran facilite le repérage. Découper l’information, la synthétiser, présenter des animations narrées constitue autant de bonnes pratiques qui permettent à l’élève d’activer sa mémoire sans la surcharger (voir le tableau de l’article de Profweb, appuyé sur la théorie cognitive de l’apprentissage, Guo et Robin 2014; Zhan, Briggs, Nunamaker, 2016; Ibrahim, Antonenko, Greenwood, Wheeler, 2012.) La durée de la vidéo, le ton et le questionnement sont autant d’éléments qui motivent l’apprentissage et soutiennent la participation active des élèves.
D’autres bonnes pistes pédagogiques
Lors du congrès du GRMS (Groupe des responsables en mathématiques au secondaire) en novembre dernier, Mathieu Thibault, professeur en didactique des mathématiques à l’Université du Québec en Outaouais, a généreusement partagé plusieurs conseils pédagogiques pour réaliser des vidéos efficaces, autant pour l’enseignant concepteur (économie de temps et d’énergie) que pour l’élève.
Monsieur Thibault propose de scinder en trois phases principales la production de capsules pédagogiques. Il propose d’abord de s’attarder à la préparation de la capsule, puis à la production et enfin à la diffusion de celle-ci. Le contexte actuel d’enseignement en ligne favorise la création de ce type de capsules tout en gardant à l’esprit qu’enseigner en ligne ne veut pas dire refaire exactement la même chose qu’en classe devant son écran. Rendre disponible aux élèves des explications vidéo peut s’avérer une manière très efficace d’adapter sa pédagogie à l’aide des outils numériques.
Pour appuyer cela, monsieur Thibault cite de nombreux exemples dans la littérature qui prouvent que ces capsules aident l’apprentissage. Modéliser des exemples de solutions de problème aux élèves (ou modéliser des stratégies de lecture, par exemple), accroît non seulement la motivation (Tiernan, 2015), mais favorise aussi la réussite dans des domaines variés (Expósito et al., 2020 ; Karsenti et Collin, 2011 ; Pereira et al., 2004). Exploiter le «mobile learning» tout en permettant un apprentissage flexible qui respecte le rythme des élèves sont autant d’arguments avancés par le chercheur pour convaincre nombre d’enseignants de se lancer dans la production de capsules vidéo pédagogiques.
Phase de préparation
Toujours selon Mathieu Thibault, la phase de préparation devrait être une occasion de se questionner par rapport à la place accordée aux capsules vidéo dans son enseignement. Dans cette phase, cerner l’intention d’écoute de la vidéo, préparer les bons documents à présenter et planifier les différents outils technologiques nécessaires au tournage de la capsule (son, logiciels, endroit calme, etc.) constituent des essentiels à ne pas négliger pour obtenir une vidéo satisfaisante au niveau pédagogique.
Des exemples près de chez-nous à la FGA
Au Centre d’éducation des adultes de la Vallée, une enseignante de sciences utilise les capsules vidéo en formation à distance depuis plusieurs années pour donner des explications et de la rétroaction personnalisée à ses élèves. Au Centre de formation Rimouski-Neigette, un enseignant de français utilise davantage la vidéo pour modéliser des stratégies de prise de notes et pour laisser des traces aux élèves lors des corrections effectuées sur leurs travaux.
Phase de production
Il est fortement conseillé de faire un petit test d’enregistrement pour tester la qualité vidéo ainsi que le son, avant d’enregistrer la capsule en entier. Vous pouvez vous chronométrer au préalable pour vous assurer que votre capsule ne dépasse pas quelques minutes (6-7 minutes en moyenne (Guo, Kim et Robin, 2014), tenter de ne pas dépasser 15 minutes (Poellhuber, 2017)). Une bonne manière de garder l’attention des élèves et de proposer des pauses où l’élève doit se mettre en action, que ce soit sur papier, à l’aide d’applications ou de logiciels ou en intégrant des éléments interactifs à votre présentation (H5P, intégré à Moodle) ou à l’aide d’EdPuzzle (en ligne). L’intention d’écoute qui devait être définie lors de la phase de planification amène à suggérer en fin de capsule un travail à réaliser par l’élève, exposé en guise de conclusion à la capsule, ou du moins à revenir sous forme de synthèse à l’essentiel de ce qui a été présenté et que l’élève devrait retenir. Finalement, monsieur Thibault suggère de rester simple et de ne pas recommencer une capsule sous prétexte d’erreurs mineures, il s’agit plutôt de se reprendre immédiatement dans la capsule comme on l’aurait fait en classe.
Phase de diffusion
Bien que de nombreuses solutions s’offrent pour l’hébergement de capsules vidéo, les publier sur YouTube demeure la solution la plus universelle et la plus simple. Il est aussi important de partager vos expériences à vos collègues pour bénéficier de leur rétroaction et pour agir auprès d’eux en tant que leader pédagogique.
Des outils numériques pour nous aider à réaliser nos propres capsules
Si ces considérations pédagogiques ont semé une graine dans votre esprit de pédagogue, je vous suggère quelques éléments plus techniques pour être en mesure d’expérimenter et de choisir des modes d’enregistrement qui satisferont vos aspirations.
Différents outils technologiques permettent de faire de la capture vidéo. Des logiciels de capture d’écran gratuits vous permettront de facilement démarrer l’enregistrement vidéo de ce que vous montrez à l’écran, en plus d’enregistrer votre narration. Pour plusieurs de ces logiciels, il est possible d’ajouter une captation de son visage dans le but de personnaliser votre vidéo. Je vous suggère quelques options très simples d’utilisation.
Pour les utilisateurs d’ordinateurs
Utiliser Windows directement
Récemment, la capture vidéo de jeux a été ajoutée à Windows 10. Il est toutefois possible d’utiliser cette fonction pour enregistrer son écran. Les enregistrements sont déposés dans un document sur votre disque dur. Si cette fonction vous intéresse, cet article montre comment l’activer et l’utiliser.
Utiliser un logiciel spécialisé
ScreenPresso permet de faire des captures d’images et des captures vidéo. Les réglages simples vous offrent la possibilité de zoomer, de suivre la souris, d’activer la webcam (pour vous filmer en même temps que votre écran) et de mettre à pause votre enregistrement, par exemple pour passer d’une fenêtre de navigation à une autre, sans montrer la transition.
Loom est une autre option qui gagne en popularité. Contrairement à ScreenPresso, qui ne nécessite qu’un téléchargement, vous devrez vous créer un compte sur Loom pour être en mesure de l’installer sur votre ordinateur. Une fois le compte créé, vous pourrez facilement le transformer en compte gratuit pour l’éducation. Sur son site, Loom indique que sa version éducation est gratuite et le demeurera pour tous les élèves et enseignants.
Pour les utilisateurs de tablettes
Avec un iPad, il est maintenant possible de capturer l’écran et d’enregistrer une narration pour en faire une vidéo. Vous trouverez sur le site du RÉCIT une foule de capsules d’activités réalisées avec la capture vidéo intégrée au iPad. Pour réaliser de telles vidéos, je vous suggère de consulter le site d’aide de Apple à ce sujet.
Si vous utilisez d’autres téléphones ou tablettes, sachez que la plupart sont équipés d’un tel système. Par exemple, les téléphones Android offrent cette fonctionnalité dans le menu notifications, en sélectionnant l’enregistreur d’écran.
Faire son propre montage vidéo
Utiliser Windows directement
Avec Windows 10, il est désormais possible de réaliser un montage vidéo à partir des photographies et des vidéos qui sont dans la photothèque, grâce à l’application Photos. Les anciens utilisateurs de Windows MovieMaker seront heureux d’apprendre qu’il est toujours aussi simple de créer rapidement une vidéo sans devoir devenir professionnel en montage. Je vous invite très fortement à visionner le tutoriel de ma collègue Nadine Martel-Octeau du RÉCIT local du centre de services scolaire de la Pointe-de-l’île pour apprendre la manière la plus simple, selon moi, de réaliser un montage vidéo pour vos capsules pédagogiques.
Monter sa vidéo dans PowerPoint
Il peut arriver que vous décidiez de narrer une présentation déjà existante, question de la rendre disponible pour vos élèves qui n’ont pas l’occasion de participer de manière synchrone à l’un de vos cours, ou simplement pour animer davantage un document PowerPoint en le transformant en vidéo. L’avantage ici est que vous n’avez pas à narrer tout le contenu d’un coup, vous pouvez enregistrer votre voix indépendamment sur chacune des diapositives, puis demander à PowerPoint de générer automatiquement la vidéo.
Créer un montage vidéo avec iMovie sur iPad
L’outil de montage vidéo iMovie ressemble beaucoup à celui de Window 10 présenté plus haut. La création de vidéo se fait en ajoutant à la trame de montage des séquences vidéo déjà enregistrées dans le iPad, des photographies et de la narration. Il ne reste qu’à ajuster les transitions entre les différentes séquences et à ajouter des titres. Il faudra exporter la vidéo pour obtenir un fichier compatible avec différents lecteurs vidéo ou pour la publier sur YouTube.
Créer sa vidéo avec Explain Everything
Cette application conçue pour créer des vidéos explicatives permet d’afficher à l’avance beaucoup de contenu, ce qui permet de prévoir les titres et tous les documents qui défileront dans votre vidéo tout au long de votre narration. La version éducative est peu dispendieuse et offre des outils d’annotation et de navigation très diversifiés.
Utiliser des services en ligne pour un visuel plus animé
De nombreuses personnes utilisent Powtown pour créer des capsules. La prise en main est très rapide, mais il est plus difficile de récupérer des documents existants ou de manipuler des applications externes (je pense à des graphiques, par exemple). Pour certaines notions ou pour sortir de l’ordinaire, utiliser ce genre de service de création de vidéo ne manquera pas d’accrocher l’intérêt de vos élèves.
Publier ses vidéos pour une diffusion plus large
Pour donner l’accès aux vidéos pédagogiques à ses élèves, il faut impérativement les partager. Pour que l’accès soit efficace et fluide, la qualité du service d’hébergement joue un rôle important. Actuellement, il existe quelques grands joueurs, mais YouTube demeure le plus populaire pour sa simplicité de partage. Souvent, les enseignants publient leur contenu de façon publique, mais non répertoriée, donc une simple recherche ne permet pas de voir la vidéo, l’internaute devant posséder le lien pour la consulter. L’enseignant peut diffuser le lien de la façon de son choix, sur Moodle ou Teams, par exemple, ou encore sur Facebook ou par courriel.
En activant un compte Google, une chaîne YouTube est automatiquement associée à ce compte. Cette chaîne permet d’ajouter des vidéos à mettre en ligne en suivant les quelques étapes jusqu’à sa publication sur le web.
Des options pour les réalisateurs de haut niveau
Si le montage vidéo vous fascine et que vous songez à y mettre plusieurs heures, sachez que Davinci Resolve est disponible gratuitement et que le logiciel Premiere pro, payant celui-là, vous permettra de créer à la hauteur de votre imagination. La prise en main de tous les logiciels professionnels de montage vidéo demande un grand investissement de temps, mais cela peut être une belle façon de conjuguer vos aspirations professionnelles à vos intérêts personnels!
Références
Planifier, réaliser et diffuser des vidéos éducatives: lignes directrices et astuces pour les enseignants , article publié sur Prof Web, septembre 2017
Tiernan, P. An inquiry into the current and future uses of digital video in University teaching. Educ Inf Technol 20, 75–90 (2015). https://doi.org/10.1007/s10639-013-9266-8
Alfonso Expósito, Javier Sánchez-Rivas, María P. Gómez-Calero, María P. Pablo-Romero,Examining the use of instructional video clips for teaching macroeconomics, Computers & Education, Volume 144, 2020, 103709, ISSN 0360-1315, https://doi.org/10.1016/j.compedu.2019.103709
Karsenti, T. and Collin, S. (2011), « The impact of online teaching videos on Canadian pre‐service teachers », Campus-Wide Information Systems, Vol. 28 No. 3, pp. 195-204. https://doi.org/10.1108/10650741111145724
J.A. Pereira, A. Merí, C. Masdeu, M.C. Molina-Tomás and A. Martínez-Carrió, Using videoclips to improve theoretical anatomy teaching, http://eurjanat.com/data/pdf/eja.04030143.pdf
Guo, Kim et Robin, 2014, How Video Production Affects Student Engagement: An Empirical Study of MOOC Videos, https://pg.ucsd.edu/publications/edX-MOOC-video-production-and-engagement_LAS-2014.pdf
Bruno Poellhuber, « Une réflexion et une expérimentation à partir du contexte des enseignants concepteurs de leurs propres vidéos pédagogiques », Distances et médiations des savoirs [En ligne], 20 | 2017, mis en ligne le 17 décembre 2017, consulté le 30 novembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/dms/2012 ; DOI : https://doi.org/10.4000/dms.2012
